Jeudi 1er juin à 19
heures, la Bibliothèque Marguerite Audoux (10 rue Portefoin 75003
Paris) nous fait l'immense plaisir de nous inviter, Elise et Lise,
Pascal Arnaud et moi, à propos de ces deux filles en miroir, du coup
je vous invite !
mercredi 31 mai 2017
lundi 29 mai 2017
Un souffle sauvage
J'ai lu Un souffle
sauvage, de Jérôme Lafargue. Ce n'est pas un roman – car
Jérôme Lafargue, pour ceux qui ne le connaîtraient pas encore, est
un formidable romancier – c'est un récit autobiographique, plus
autobiographique que narratif, d'ailleurs. Il est aussi court que
l'auteur est secret. Et quand je l'ai refermé, je me suis rendu
compte que je l'avais déjà lu. Je l'avais déjà lu entre les
lignes de ses romans. Je l'avais déjà lue entre les lignes de ses
romans, cette figure du père enracinée parmi les pins des Landes.
Mais là, en lisant les lignes écrites entre les lignes, c'était
bon de les avoir pour de vrai sous les yeux, les lignes entre les lignes,
et ça m'a fait comme une tape discrète sur l'épaule. Et en effet
je lisais assis sur un banc, sous un vieux catalpa, qui venait de
laisser choir une gousse sèche sur mon épaule pour me faire signe.
Et je me suis dit : on n'est jamais seul.
Cette photo, c'est le
tronc du vieux catalpa. Je l'ai prise avant de m'asseoir sur le banc.
Quant à Un souffle sauvage, il vient de paraître aux
éditions du Sonneur.
jeudi 25 mai 2017
Au centuple
Toutes les cent histoires
(lesquelles n'en sont pas toujours au sens strict du terme – mais
certes tout n'est-il pas qu'histoires ?) composant ce huitième
livre de Jérôme Lafargue qui, pour tout récemment paru (aux éditions de l'Attente) qu'il soit, n'est déjà plus le dernier (et
cela nous rassure, vous allez comprendre pourquoi), comptent cent
mots, ni plus ni moins. Aussi m'en faudra-t-il exactement le même
nombre pour composer ce billet, lequel selon mon habitude ne parle
pas du livre lui-même, mais informe son auteur imprudent que le voici
condamné, pour une parfaite cohérence, à en publier encore
quatre-vingt-douze autres.
lundi 22 mai 2017
Premier album, septième pellicule : figures.
On m'écrit : « J'aime ce passage. » Alors, tiens,
puisque je l'aime aussi, je le recopie. C'est dans Mémoires des
failles, paru il y a juste deux ans aux éditions de l'Attente.
Premier album, septième
pellicule : figures.
Rien d’étonnant dès
lors dans la tentation, récurrente à cette époque, de se couper du
reste du monde. Ce n’est pas difficile. Il suffit de fermer les
yeux. De les fermer très fort. Ça ne les empêche pas de voir, oh
non, loin de là. Mais au moins, on sait à l’avance, à peu de
choses près, ce qu’on va voir : le spectacle est toujours le
même.
C’est un spectacle
abstrait. Il commence doré et soyeux, en perpétuel et total
mouvement, décomposable à l’infini en de multiples échanges
d’infimes allers et de retours symétriques, organisé autour d’un
centre en couronne pseudo-circulaire aplatie horizontalement, plus
foncé dans sa périphérie indécise et presque angora, plus
lumineux à l’intérieur, avec sans doute, au centre du centre, un
point de fuite tel un point de chute, aussi bien noir qu’éclatant,
principe essentiel autour duquel le reste s’organise. Mais bien
avant d’en avoir pris une telle conscience c’est, sur la même
structure concentrique, une tonalité tout autre qui brusquement et
sournoisement se révèle, des motifs quasi algébriques, crépitant
de blancheurs à angles droits, sur des fonds de couleurs primaires,
rouges dans les parties intermédiaires, jaune éclatant au milieu,
bleu ou vert sombre et froids aux bordures à peine perceptibles.
C’est d’autant moins plaisant, moins chatoyant que l’on
commence à percevoir un mouvement essentiel dont on comprend qu’il
a toujours été là, et dont seule la somptueuse richesse des
débuts a empêché la prise de conscience ; une lueur
autoritaire sous-jacente au centre du panorama, qui agite
régulièrement, avec une vivacité difficilement supportable, des
membres indéfinis et venteux de mécanique intérieure, balayant les
restes dépréciés d’une algèbre éparse, se manifestant de plus
en plus clairement comme une menace telle qu’il devient impossible
de rien voir d’autre, de sorte qu’on ne peut poursuivre.
dimanche 21 mai 2017
douceur du chômage
je touche le chômage il
est doux souple, un peu poilu
d'autres l'ont glabre et
rugueux
je prépare mon corps
pour la phrase dite
chômage et je hurle
chômage
plus fort personne n'entend je promets de hurler de mieux en mieux je
ne suis pas en mesure de promettre mais personne n'entend je promets
à l'espace je suis un chômeur monstrueux je crache sur le travail
mon
cœur est un piano fermé à clef dit la jeune fille quelle musique
entendre alors quel air aimer ?
le
désir était là quelqu'un l'a détourné
les
techniques ont caché les outils j'ai appris à m'en servir mais pas
pourquoi je m'en servais
Antoine Mouton,
Chômage monstre, éditions La Contre-allée, 2017, p.
64-LXV.
lundi 15 mai 2017
Un réverbère
Un réverbère dans la
brume peut-il résumer une pensée ?
Peut-il les résumer
toutes ?
Que partage-t-il avec son
reflet dans l'eau ?
Deux idées justes par
jour, comme une horloge arrêtée ?
Pascal Blondiau,
Dès l'instant, Les Carnets du Dessert de Lune, 2010.
Illustrations de Marie Campion.
dimanche 14 mai 2017
un dilemme
En fait il y a deux
écueils essentiels et opposés, Charybde et Scylla entre
lesquels l'artiste doit naviguer : d'un côté il risque de
trahir son œuvre, de l'autre il devient le singe de lui-même.
Tenir le cap même
n'est pas une expression à suivre à la lettre.
samedi 13 mai 2017
Une formule est une petite forme.
Un jour, j'avais seize ou
dix-sept ans, j'ai écrit un tout petit poème. A cette époque,
j'écrivais tous les jours. Je m'asseyais à mon bureau – ou
peut-être plutôt que je m'allongeais sur le lit, en fait –, et
j'écrivais. Je partais pour longtemps. Et cette fois-là, j'ai écrit
une dizaine de mots, et c'était fini. J'ai essayé de continuer le
poème, de le rallonger ; mais non, il n'y avait plus rien à
dire. Il n'y avait pas d'au-delà. Je ne savais pas que ça
pouvait être si court. Il m'a fallu l'admettre.
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