Me promenant sur la Toile (avec désormais une pensée émue pour l’araignée blessée de François Matton), je passe par RougeLarsenRose où Laure lit, dans la revue le
Bon-à-tirer, Jean-Philippe Toussaint évoquant
deux lectures déterminantes qui ont « sans
doute favorisé [s]a décision de commencer à écrire ». On a tous en
effet, de bonne heure dans notre histoire personnelle, une ou deux
lectures ou plus qui ont vraiment compté, qui ont
déclenché quelque chose. Pour Jean-Philippe Toussaint, grâce à la
grande sœur, il y a notamment Crime et châtiment.
Crime et châtiment, oui, à coup sûr, je souscrirais volontiers au
théorème proposé : « Qui lit Crimes et châtiments se met à écrire un mois plus tard ». Quand je l’ai lu moi-même, ça a
été un choc, il fallait que tout le monde le sache : Crime et châtiment est
un authentique chef d’œuvre ! Mais la plupart des
gens autour de moi, hélas, étaient déjà au courant. Il faut dire
aussi que c’était l’année dernière, ou celle d’avant ; je ne sais plus. A
être un lecteur en herbes, on peut parfois faire figure de lecteur attardé. Qu’importe, j’ai toujours été du genre à réserver dans mon assiette le
meilleur pour la fin. Remettre à plus
tard, ça n’a pas que du mauvais.
En tout cas il est clair qu’en ce qui me concerne, Crime et
châtiment est innocent. Ne blâmez pas Raskolnikov, ce n’est pas
lui qui m’a projeté dans l’écriture. Et maintenant que j’y songe, que
je cherche… Rien ! Je ne trouve rien. Je me revois
assis devant mon petit secrétaire d’enfant, à écrire. Derrière moi,
dans l’étagère, pour ainsi dire, rien. Autant dire qu’avant moi, il n’y
avait personne. La page était blanche. J’étais le
premier écrivain. (Il faut dire aussi que c’était à un âge où, le
plus souvent, on n’a pas lu grand-chose.)
Qu’on
n’aille pas, cependant, croire que je n’ai pas eu, moi aussi, mes
lectures déterminantes. Vers dix-sept,
dix-huit, vingt-trois, trente ans, j’ai lu Samuel Beckett. Cette
lecture, oui, a été déterminante pour mon écriture : elle l’a empêchée.
(Elle a bien fait.)
Philippe, tu rebondis plus vite que ton ombre - moi, je ne suis toujours pas redescendue sur Terre.
[...]
(Merci à toi surtout et à tous ceux et à toutes celles qui aiment les squaws et les raccourcis.)
(mais bien moins léger en effet que cette plume incroyable, Loïs).